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Comment agir en concurrence déloyale en quatre étapes - Crédit photo : © Collette Avocat
Crédit photo : © Collette Avocat

Comment agir en concurrence déloyale en quatre étapes ?

Auteur : Hugues Collette
Publié le : 07/07/2020 07 juillet juil. 07 2020


Comment une entreprise peut-elle faire face à un acte de concurrence déloyale ?


Cette question, tout dirigeant d'entreprise est susceptible de se la poser lorsqu’il aura constaté avoir été victime d’un agissement déloyal de la part d’un autre acteur du marché.


Cela peut arriver à tout moment de la vie d’une entreprise et la déstabiliser durablement dans son développement commercial.


C’est la raison pour laquelle, une description synthétique en quatre étapes de la manière dont se construit une action en concurrence déloyale vous est exposée afin de vous permettre de mieux faire face à cette éventualité, le moment venu.

 

Phase 1 : Comment investiguer la pratique déloyale et les personnes impliquées ?



Toute entreprise se doit de respecter le libre jeu de la concurrence, qui découle de la liberté d’entreprendre.


A ce titre, toute entreprise doit s’abstenir dans la vie des affaires de tout acte déloyal à l’égard des autres acteurs du marché.



Les atteintes à ce principe prennent de multiples formes, dont les principales sont les suivantes.


De tels actes déloyaux peuvent être commis par une multitude de personnes : un salarié, un associé, un partenaire, un concurrent, une association, un revendeur, un nouvel entrant sur le marché, une collectivité publique…


L’essentiel pour une entreprise qui s'estime être victime d’un agissement déloyal est de pouvoir réunir les premiers indices permettant d’établir une suspicion sur son existence et sur les personnes impliquées.


Ensuite, son conseil doit être alerté dès que les premiers soupçons ont été corroborés : ce dernier pourra alors orienter les investigations afin de caractériser au mieux l’existence de la pratique et son éventuel caractère déloyal.


Il est donc crucial de rassembler les éléments permettant de cerner l’étendue de la pratique avant d’éveiller l’attention de la personne suspectée. Il s’agit de mener de manière discrète une véritable enquête sur les pratiques suspectées.


La gestion du temps est précieuse dans cette phase, en particulier face au risque de destruction de preuve de la part de l’auteur de la pratique et de ses éventuels complices, qui peuvent vouloir cacher leur forfait, en escamotant les éléments pouvant les incriminer.


En outre, il est très utile de bénéficier de plusieurs sources d'informations. En effet, le fait d’obtenir une source, extérieure à votre entreprise, pourra vous permettre de corroborer les premières suspicions, déjouer les tentatives de destruction de preuve, explorer de nouvelles pistes et ainsi renforcer votre position devant le juge ou dans le cadre d'un mode de résolution amiable.


Cette étape d’investigation peut durer de quelques heures, dans le cas par exemple de la constatation de propos diffusés dans la presse et assimilables à du dénigrement, à quelques jours, pour notamment le cas d’un détournement d’informations confidentielles par un ancien salarié nécessitant une investigation informatique.

 

Phase 2 : Quelles sont les premières mesures à prendre ?

 

Les mesures probatoires



L’existence de certains actes de concurrence déloyale peut être aisément démontrée. Il en va ainsi d’une méconnaissance d’une réglementation qui a déjà été sanctionnée par une autorité administrative ou une juridiction ou encore d’un dénigrement qui ressort de propos publiés dans la presse.


D’autres types d’actes de concurrence déloyale nécessitent des mesures probatoires précontentieuses afin de pouvoir établir leur existence et/ou leur caractère déloyal. Il en va ainsi du détournement d’informations confidentielles par un ancien salarié qui requiert de constater un accaparement illicite de sa part et donc de la détention de telles informations par ce dernier.


A cet égard, l’article 145 du code de procédure civile permet à toute entreprise de saisir, avant tout procès, le juge de la mesure probatoire afin d’obtenir de lui la désignation d’un huissier pour qu'il se rende chez la personne suspectée d’être l’auteur de la pratique ou susceptible de posséder des éléments probants à cet égard et se voie remettre les documents pertinents qui pourront servir de preuves dans un contentieux futur relatif à ladite pratique.


L’entreprise qui saisit le juge de la mesure probatoire précontentieuse doit faire état d’un motif légitime, c’est-à-dire de suspicions étayées par des indices, les rendant suffisamment crédibles.


Le juge saisi sur ce fondement opérera alors un contrôle de l’existence d’un motif légitime pour justifier le prononcé d’une telle mesure.


Le juge cherchera en outre à circonscrire la mesure sollicitée aux seules suspicions légitimes qui lui ont été exposées (délimitation géographique, matérielle et temporelle des éléments recherchés ainsi que désignation des personnes visées par celles-ci).


Dans le cadre de ce contrôle, la protection du secret des affaires de la personne contre laquelle la demande en mesure probatoire précontentieuse est présentée, est un paramètre qui sera pris en considération par le juge de la mesure probatoire précontentieuse, mais ne saurait à lui seul interdire une telle mesure.



Une telle mesure probatoire précontentieuse peut être prononcée dans le cadre :

 
  • D’une demande en référé. Les parties présentent leurs arguments contradictoirement au juge des référés qui le cas échéant ordonnera la mesure probatoire précontentieuse, par une décision susceptible de faire l’objet d’un appel ;
 
  • D’une ordonnance sur requête, c’est-à-dire une ordonnance rendue non contradictoirement. Dans ce cas, le juge ordonnera la mesure probatoire précontentieuse au seul vu des arguments du requérant. L’ordonnance sera alors signifiée et la mesure exécutée par un huissier chez la personne visée dans l’ordonnance. La personne ayant souffert la mesure pourra alors saisir en référé le juge ayant prononcé la mesure aux fins d’obtenir la rétractation de son ordonnance. Ce n’est qu’à l’issue d’un débat contradictoire que le juge des référés pourra confirmer ou rétracter son ordonnance, par une décision susceptible de faire l'objet d'un appel.


Dans les deux cas de figure, les informations recueillies dans le cadre de cette mesure par l'huissier diligenté ne seront pas communiquées immédiatement au requérant, et ce afin de préserver les intérêts légitimes de l'entreprise ayant subi la mesure.


Ce n’est en effet qu’après que la légalité de la mesure ordonnée ait été validée par les juridictions saisies et sous réserve que les mesures protectrices du secret des affaires prises (mesures visées à L.153-1 du code de commerce, dont le séquestre prévu à l'article R.1653-1 du même code) soient levées que le requérant pourra accéder aux documents collectés par l'huissier lors de la mission qui lui a été confiée.



L’issue de ces procédures probatoires précontentieuses déterminera pour une large part la solution que pourra donner le juge du fond, saisi d'une demande en réparation du préjudice découlant de la pratique déloyale :

 
  • Si la mesure ordonnée et donne lieu à une collecte fructueuse d’informations, la position du demandeur sera d'autant plus solide devant le juge du fond ;
 
  • Si en revanche la mesure sollicitée est rejetée, rétractée ou si elle donne lieu à peu de résultats pertinents lors de son exécution, l'opportunité d'une action en réparation devra être appréciée, au regard de la force probatoire des éléments probants à disposition.
 


Les mesures en cessation



Une pratique déloyale qui perdure vient aggraver le préjudice subi par l'entreprise qui en est la victime. C'est la raison pour laquelle, cette dernière peut solliciter sa cessation.


Dans le cadre d’une campagne publicitaire dénigrante, un seul courrier de mise en demeure peut suffire pour obtenir la cessation des pratiques.


Dans d’autres cas de figure, il est nécessaire de faire appel à un technicien (comme pour juguler une fuite de données informatiques) ou de saisir le juge pour qu’il ordonne en urgence la cessation des pratiques illicites. 
La cessation des pratiques sera ordonnée par le juge des référés en présence d'un trouble manifestement illicite.

 

PHASE 3 : COMMENT QUANTIFIER SON PREJUDICE ?



Si l’existence d’un préjudice est présumée en matière de concurrence déloyale, il incombe au demandeur de présenter une évaluation chiffrée de l’indemnisation qu’il réclame. A défaut, il sera débouté de sa demande.


Pour qu’elle puisse ouvrir droit à une indemnisation, une telle évaluation doit reposer sur les chefs de préjudice suivants : le manque à gagner, la perte subie, le préjudice moral $ainsi que dans certains cas sur l’avantage indu que s’est procuré l’auteur de la pratique.


Il peut être utile de s’adjoindre l’aide d’un expert afin de crédibiliser une demande en indemnisation dont le montant est élevé et de s'approcher au mieux du préjudice réellement subi.


Il convient en tout état de cause d'évaluer un par un les chefs de préjudice, étant précisé que l'estimation retenue devra prendre en compte les seules conséquences négatives qui ont un lien de causalité avec les pratiques déloyales en cause.



L'ancienneté des pratiques a également un impact sur cette évaluation. A cet égard, une demande visant à réparer spécifiquement le préjudice né de l'écoulement du temps apparaît judicieuse.


Cette étape de l'évaluation du préjudice réparable peut durer plusieurs mois. L’importance de celle-ci ne doit pas être sous-estimée puisqu'elle permettra de quantifier les prétentions en dédommagement et de les faire valoir dans le cadre d’un mode de résolution amiable ou devant le juge.

 

Phase 4 : COMMENT OBTENIR REPARATION ?



Présenter une demande en réparation devant le juge du fond, c’est raconter une histoire qui contextualise les actes constatés afin de faire ressortir leur déloyauté. Ce contentieux est avant tout une question de narration de faits et de preuves, qui vise à faire ressortir la déloyauté de la pratique en cause


Cette histoire sera exposée au sein de l’acte par lequel est introduite une instance en réparation du préjudice découlant d’un acte de concurrence déloyale contre son auteur.


Avant de voir sa demande au fond tranchée, le demandeur peut se heurter à quelques écueils procéduraux qui devront être anticipés par son conseil : le juge saisi est-il compétent ? La personne attraite devant les tribunaux est-elle bien le responsable de l’agissement déloyal invoqué ? L’ensemble des formalités pour saisir le Tribunal ont-elles été respectées ? La pratique n'est-elle pas trop ancienne ?


Une fois ces questions procédurales traitées, le juge entendra les arguments des parties sur le fond et analysera leurs pièces. A cet égard, le nouveau régime de protection du secret des affaires pourra inciter les demandeurs à étayer de manière plus précise leurs demandes en versant une large documentation éventuellement stratégique, puisque seule une version non confidentielle de cette documentation pourra être communiquée à la partie adverse.


A la lumière des moyens et prétentions formulés par les parties et des pièces versées au débat, le juge tranchera l’affaire en appréciant si :

 
  • L’existence de la pratique est établie
 
  • Le caractère déloyal de la pratique est démontré
 
  • La pratique est imputable à la personne qui a été attraite en justice


Auquel cas, le juge entrera en voie de condamnation à son encontre.


Une fois cette étape procédurale franchie, le juge pourra entre autres :


 
  • Ordonner une mesure d’expertise afin de l’aider à quantifier le préjudice indemnisable
 
  • Apprécier souverainement le montant de l’indemnisation du préjudice allégué.
 
  • Ordonner une injonction de mise en conformité, sous astreinte
 
  • Ordonner une mesure de publicité


Cette décision qui est susceptible d’être contestée devant la cour d’appel compétente, est exécutoire par principe, même en présence d’un appel.

 

Remarques conclusives

 


Les contentieux en concurrence déloyale sont d'une grande diversité par leur forme et leurs enjeux. Ils ont toutefois des points communs qui permettent de dresser les grandes lignes de leur déroulé, en particulier l'enjeu probatoire.


De manière plus générale, les entreprises qui disposent du mécanisme de mesure probatoire précontentieuse doivent être sensibilisées au fait qu'elles peuvent elles aussi faire l'objet de telles mesures de manière impromptue.


A cet égard, si vous êtes confronté à des pratiques déloyales, le Cabinet COLLETTE AVOCAT est en mesure de vous apporter ses conseils et son assistance, à la lumière de son expertise en matière de concurrence déloyale, dans le cadre du Forfait action en concurrence déloyale.
 

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